Tunis,
7 juil (TAP) - L’entrée de la maison de la culture de Meknassy présente une
scène de désolation : Les portes extérieures grandes ouvertes, sans chaines ni
gardiens, les ordures jonchent le sol un peu partout et pour corser
l’atmosphère de l’épouvante, une couche de poussière de sable déposée par un
vent du sud, recouvre les lieux.
C’est
dans ce décor triste que le théâtre de plein air, se dresse sans grandeur
malgré sa coquette scène qui subit les aléas du temps, sans entretien ni effort
de restauration. Pas de peinture ni de badigeonnage non plus. Seuls deux
anciens graffitis en effritement ornent des murs voués à l’abandon. On avance
de quelques mètres pour déchiffrer les lettres restantes inscrites sur une
enseigne, il s’avère après un effort de lecture qu’il s’agit de la
bibliothèque.
Il
était environ 18 heures. La maison de la culture, était bel et bien déserte.
Malgré le défaitisme ambiant des ainés qui sommeillent, les petits, eux
s’activent, pour apporter une note de vie en musique et en couleurs à la cité.
En effet, un peu plus loin, sur la « Corniche » de Meknassi, une sorte de
promenade, à environ un quart d’heure de marche, des jeunes pressent le pas
pour être à l’heure pour donner leur spectacle. Il s’agit du concert « Bin el
Ouedyane » (entre les oueds), porté par l‘association fraichement créée « Art à
Meknassy » et présidée par le jeune Mouadh Gammoudi soutenu par une grappe de
jeunes dynamiques qui militent pour réconcilier leur ville avec l’art dans ses
formes multiples.
Bin el
Ouedyane
Ramadan
tirait à fin et il ne restait que trois jours de jeûne, et l’association Art à
Meknassy voulait apporter avec cette toute première soirée musicale
ramadanesque, une brise d’air frais en cette journée de canicule. Juste après
la rupture du jeûne, direction la Corniche, cette ancienne décharge publique
située sur la route nationale 14 Gafsa-Sfax et transformée récemment en jardin,
a pris des allures de fête foraine grâce aux dons de toute nature de la
population locale.
Une
petite scène y a été aménagée pour l’événement organisé grâce au soutien de la
maison des jeunes, la municipalité et la communauté. Sous le déluge des feux
des artifices, qui attiraient badauds et curieux, la place était rapidement au
grand complet. Les spectateurs sont venus découvrir des artistes et des
talents, les leurs. On ne peut mieux être servi que par soi-même, disaient ces
spectateurs venus dénicher, en cette 27 ème nuit de Ramadan (Laylet el kadr),
quelques instants de chant, de musique et pourquoi pas de danse réservée à la
gente masculine.
Sous
une surveillance sécuritaire, la place publique n’arrêtait pas de recevoir les
habitants ; Jeunes, enfants, femmes et hommes de toutes tranches d’âge se sont
bien préparés et porté leurs meilleurs vêtements pour assister à la fête,
surtout que c’était la nuit du Destin. Le jeune chanteur Rayen Rdaoui, de sa
belle voix, a commencé à raviver le rythme avec un savoureux mélange de
chansons notamment du patrimoine comme Na jit zaiyer, Ya wali Meknas, Ala bab
darek, Baba bahri ou Ya fares baghdad.
Sous la
houlette de Rayane qui s’est adonné à cœur joie au chant, le concert, d’environ
deux heures, a réuni dans la chorale Amine Belgacem Gammoudi, Sameh
Khaskhoussi, Saber Hattabi et Raki Khaskhoussi et ce avec les jeunes musiciens
Ghaith Jaouadi à la guitare électrique et Rochdi Chneni à la guitare bass,
Rafik Raddaoui à la batterie, Amine Gammoudi, Malek Salhi et Aladin
Sakhraoui aux percussions ainsi que Thamer Lefii au clavier.
Grande
forme pour ces jeunes aux origines esthétiques et horizons différents, qui
demeurent à découvrir. Reste que le pari est de pouvoir avancer, percer. Pour
cela, laisse entendre Ghassen Mahfoudhi, un jeune actif sur la scène culturelle
régionale, un coup de pouce des autorités concernées est bel et bien nécessaire
surtout que les discours portent sur une politique culturelle misant sur les jeunes
et sur la culture auprès de tous notamment dans les régions intérieures et
marginalisées
; tel l’exemple de Meknassy, une ville, qui a enfanté des virtuoses ayant
réussi à investir la scène musicale internationale pour ne citer que le
percussionniste Imed Alibi, qui a largement combattu pour la fondation de
l’association Art à Meknassy, sa ville natale située dans le gouvernorat de
Sidi Bouzid d’où s’est déclenchée la première étincelle des événements du 14
janvier 2011 dont le crédo : Dignité pour Tous.
SB